Amougies 1969 : Pop-Free & Pommes Frites

Vous festivalsiez cet été ? J’en suis fort aise…

Eh bien ! chantez maintenant… car lorsque vous lirez ces quelques lignes, il sera bientôt temps de célébrer le 50e anniversaire du 1er festival « pop » en terre non seulement européenne, mais aussi francophone : le festival d’AMOUGIES.

J’ai longtemps cru que cette localité, que je ne connaissais que de nom, se trouvait dans quelque contrée ensoleillée et cigalière du sud-est de la France, à l’instar d’Orange ou d’Antibes : absolument pas, Amougies se trouve en… Belgique !

A senior tout au nord (car frontalier thiérachien), je me permets de souffler en avant-première les bougies de ce festival qui s’est tenu, non pas en été pour faire comme tout le monde, mais à la fin du mois d’octobre 1969, et ce durant 5 jours !

Amougies, voilà un nom qui fleure la nostalgie ! Il commence comme « amour » et se termine comme « bougies » : c’est un véritable raccourci pour exprimer un sentiment à l’épreuve du temps qui passe, mais que rien ne défait, car l’amour pour la musique est plus fort que tout …

« Byg Love », on aurait pu baptiser ce festival ainsi, car il était organisé en partie par le label discographique « BYG », très à la pointe à cette époque-là … mais il est connu sous l’appellation « Festival Actuel », du nom de son autre parrain, le tout jeune magazine « ACTUEL »,  consacré alors au free jazz et aux musiques « alternatives » de cette glorieuse décennie finissante.

L’adjectif « ACTUEL » va faire ensuite son chemin, en se féminisant et se pluralisant, pour désigner les musiques « amplifiées », celles que célèbre justement l’opuscule que vous nous faites le plaisir de parcourir en cet instant …

« Au fait, c’était quoi, les musiques actuelles en 1969 ? »

Si on se réfère à l’affiche emblématique de ce marathon musical, on ne s’embarrassait pas encore des innombrables étiquettes qu’on leur colle aujourd’hui… C’était « pop » ou c’était « free », poing-bar !!!

Et l’équilibre entre les 2 était rigoureusement respecté : chaque jour 4 groupes de chaque genre ! On parlait peu d’ « influences », car il n’y avait pas encore suffisamment de recul en la matière…

Toujours sur cette affiche, on peut constater que les mots les plus gros (et non pas les plus gros mots !) sont, outre les noms des organisateurs, ceux d’une radio généraliste et d’une boisson anisée… voici 2 différences de taille avec nos habitudes de consommation « actuelles » : la radio n’est plus le vecteur privilégié de la musique et la boisson conviviale des festivaliers n’est plus anisée mais houblonnée !

Enfin si, entre vétérans du rock, on évoque ce festival, la référence, que dis-je, l’icône qui met tout le monde d’accord, c’est le dessin de ce bonhomme archétypique, qui semble esquisser  un pas de danse juché sur des chaussures conçues pour parcourir les milliers de kilomètres de la « Hippie trail » (route des hippies) !

Je ne vais pas vous faire un récit soporifique de ce festival : vous trouverez une liste non exhaustive des sites qui lui sont dédiés :

Je ne vais pas non plus vous ennuyer en vous parlant des musiques de 2019 et des festivaliers qui en sont amateurs : vous les côtoyez et vous les connaissez beaucoup mieux que moi.

Constatons simplement que tout s’est multiplié dans la musicosphère depuis 50 ans : les créateurs, les labels, les produits, les consommateurs, les genres musicaux, les festivals,… les marques de bières, également, qu’on consomme partout, avec ou sans frites !

Par contre je pense qu’il ressort de la raison d’être d’un fanzine de musiques actuelles de (se) poser des questions sur le DEVENIR de ces musiques :

« Ce sera quoi, les musiques actuelles en 2069 ? »

Livrons-nous à une petite valse des étiquettes couplée à un petit exercice d’anticipation …

  • la « world music » n’existera plus : elle sera remplacée dans le meilleur des scenarii par la « universe music » et dans le pire par la « nothingness music »…
  •  un nouveau concept, le « Tribute Two Tribute To », créé par les petits-enfants de membres actuels des « cover bands », permettra d’entretenir les héritages musicaux et financiers des glorieux initiateurs …
  • le 5 décembre, les rares survivants (il y en aura certainement … dans le cas du meilleur des scenarii !) de la génération Rolling Stones souffleront les 100 bougies du gâteau figurant sur la pochette de « Let It Bleed », lequel aura été reconstitué pour l’occasion grâce à une imprimante 5D (le goût & le son comme 4e & 5e dimensions) …

« Un peu de sérieux, Balte ! Imagine plutôt l’affiche d’un festival en 2069 ! »

Eh bien, la question fondamentale que je me pose est : « Est-ce que les affiches existeront encore en 2069 ? »

Si le rythme auquel court le monde continue à être celui qu’il est actuellement, il se pourrait qu’on assiste à une multiplication « exponentielle » des offres et des demandes culturelles… L’intelligence artificielle pourrait pourquoi pas amener chacun à produire et consommer sa propre culture, et à  ne plus faire la démarche d’aller entendre et voir ce qui se passe ailleurs… On pourrait donc, au pire, arriver à l’extinction des évènements musicaux, donc des affiches, des fans, des fanzines…

Mais ne soyons pas si pessimistes, l’histoire n’est pas linéaire … Pour le moment tout cela existe encore, alors profitons-en : j’ai demandé à 2 Mineures de créer leur propre visuel des « festivaliers » de 1969, 2019 et 2069, en partant de la silhouette de l’affiche de 1969. Merci à elles, et je vous laisse admirer en page X le résultat de leur travail.

Balte Hasard